Open data : encore un (gros) effort !

Pour les collectivités, les enjeux liés à l’obligation de publier numériquement leurs données ouvertes (open data) sont multiples : techniques, organisationnels… Les solutions aussi.

Peu de collectivités seront présentes au rendez-vous de l’open data obligatoire, le 8 octobre prochain. Tel est en tout cas le sentiment de l’observateur avisé qu’est Jean-Marie Bourgogne, délégué général de OpendataFrance (ODF1), l’association de référence qui regroupe et représente les collectivités territoriales françaises dans leur démarche (existante ou en projet) d’ouverture de leurs données. Entre intervenants publics et privés, ils devraient être en effet un peu plus de 400 à être prêts au « jour J » (cf. cartographie par ODF2), soit beaucoup moins que d’acteurs concernés, plus de 4 400 structures publiques. La progression se fait au rythme d’environ 100 par an.

La contrainte de la diversité

La tâche est en effet importante. Pour résumer, au plus tard début octobre 2018, il est obligatoire pour celui qui les produit de publier, par défaut et via internet toutes ses données d’intérêt économique, social, sanitaire ou environnemental, sauf si elles sont protégées (personnelles, en lien avec un secret commercial ou la sécurité publique, soit 10 % de la production). Ces données publiques ouvertes sont appelées open data. La liste est en principe immense3 mais sur le terrain dépend pour partie de l’acteur concerné (taille, rôle…), intégrant par exemple les données budgétaires, le menu des cantines scolaires, les niveaux de pollution, les arbres remarquables…. Le tout sous format libre, sans mot de passe ni logiciel spécifique pour y accéder. A chacun de voir selon ses spécificités.

L’obligation a été instituée par la loi du 7 octobre 2016 pour une République Numérique. Sont concernées les structures de plus de 3 500 habitants ou de plus de 50 agents, parmi lesquelles l’Etat (ministères), les collectivités (environ 3 500), des acteurs publics tels que notamment les syndicats mixtes et agences (1 000), mais également des acteurs privés agissant dans le cadre d’une mission de service public (délégataires de transport, de gestion de déchets…). Élément important, la loi ne prévoit aucune sanction. Mais ne rien faire c’est risquer une dégradation de son image au regard des citoyens ou du tissu économique local – l’open data est sensé générer des services à concevoir par le privé -, voire un contentieux devant les tribunaux.

Nécessité d’une méthodologie

Certaines grandes collectivités, commente en substance Jean-Marie Bourgogne, publient déjà depuis années des données ouvertes. Elles disposent des moyens techniques et financiers pour le faire. La communication de ces informations nécessite en effet un travail préparatoire : identification et récupération de la data, contrôle de son contenu, restitution via des tableaux sous un format compatible avec la loi… Sans oublier les mises à jour, essentielles. Cela peut passer par la mise en place d’une organisation dédiée, comme par exemple pour la Communauté urbaine de Dunkerque (CUD) qui a nommé un chef de projet et créé un réseau de « référents » dans ses services. Quant à la publication en elle-même, les villes s’appuient sur leurs équipes ou passent par des plateformes spécialisées, sachant que la plateforme de l’Etat, « data.gouv.fr »4, leur est également ouverte.

Des pistes pour améliorer les dispositifs

On le devine assez aisément, ces contraintes constituent autant d’obstacles, parfois insurmontables, pour les collectivités de petite et de moyenne taille. Seules quelques unes, des pionnières, ont d’ailleurs relevé aujourd’hui le défi. C’est le cas de Digne-les-Bains (18 000 habitants) dont le chargé de mission open data, Cyrille de Villèle, confirme le caractère exigeant de sa mission : une démarche essentiellement manuelle, initiée avec les services « volontaires » de la ville, constituée de relances régulières et de mises à jour.  Les données de la ville sont publiées sur le site dédié mis en place par la région PACA5, acteur décisif sur ce point, qui offre ce service aux collectivités de son territoire.

L’accompagnement de petites collectivités par une structure plus importante se retrouve également en Bretagne (région, plusieurs départements et grandes villes, intercommunalités), mais il est loin d’être généralisé. Florence Jardin, maire de Migné-Auxances (6 000 habitants), par exemple, explique que sa collectivité est « dans les clous » mais selon elle, l’open data « ça fait partie des choses à étudier » par la communauté urbaine de Grand Poitiers. D’une manière générale, Jean-Marie Bourgogne estime que ces échanges entre acteurs publics pourraient « booster » l’open data. Mais ce n’est pas la seule piste d’après lui. Les éditeurs de solutions logicielles se font encore attendre pour proposer des modules permettant de produire des données aux formats normalisés pour alimenter plus efficacement les sites et les plateformes. Voilà une bonne raison d’engager le dialogue avec eux lors d’AP Connect, le salon des solutions IT pour les administrations publiques, qui se tiendra les 29 et 30 janvier 2019 à l’Espace Grande Arche à Paris, La Défense.

1http://www.opendatafrance.net/

2 https://umap.openstreetmap.fr/fr/map/carte-odt-prefiguration_206077#5/47.710/-2.043

3http://www.opendatalab.fr/images/doc/NouvellesVersions3/Projet-Open-Datalab—quelles-obligations-rglementaires-V2.1.pdf

4 https://doc.data.gouv.fr/     https://www.data.gouv.fr/fr/datasets/liste-des-collectivites-territoriales-ouvertes/

5http://opendata.maregionsud.fr/

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